Monsieur le Président,
Je tiens à vous remercier d’avoir organisé ce débat ouvert virtuel sur les méthodes de travail du Conseil de sécurité. La tâche du Groupe de travail informel sur la documentation et les autres questions de procédure est primordiale pour garantir que le Conseil de sécurité fonctionne de manière transparente, efficace et performante. Je tiens à féliciter les présidents actuel et précédent du Groupe de travail pour les efforts qu’ils ont déployés afin de contribuer à cet objectif.
Le débat d’aujourd’hui se déroule dans le contexte d’une pandémie sans précédent qui a notamment affecté la manière dont le système des Nations unies mène ses activités.
Nous saluons le travail accompli par les présidents du Conseil de sécurité (Chine, République dominicaine et maintenant Estonie) au cours de ces dernières semaines visant à assurer la continuité de la mission lors de la mise en place des directives sur le travail à domicile. Les membres du Conseil ont mis au point des mécanismes pour s’assurer que celui-ci continue à remplir son mandat, à adopter des résolutions et, en fin de compte, à servir ceux qui sont touchés par les menaces pour la paix et la sécurité internationales. En même temps, dans ces circonstances extraordinaires, le respect des principes de transparence, d’efficacité et de performance du Conseil de sécurité a pris un nouvel essor et pourrait nécessiter la mise en place de procédures innovantes.
Le monde compte sur le Conseil de sécurité pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales, même lorsque les réunions n’ont pas lieu à la table iconique en forme de fer à cheval. Nous nous félicitons de l’accent mis sur la transparence lors de l’élaboration des méthodes de travail provisoires dans le cadre de la COVID-19 par les présidences du Conseil. Nous encourageons les membres siégeant au Conseil à améliorer encore les procédures existantes en matière de transparence et d’intégration des travaux du Conseil en autorisant les États membres à faire des déclarations orales en séance publique, même si elles ont lieu dans le cadre de vidéoconférences. Le grand intérêt et la participation de haut niveau à la réunion en formule Arria marquant la fin de la Seconde Guerre mondiale en Europe illustrent l’intérêt des États membres à continuer de contribuer aux discussions de cette prestigieuse instance.
Il faudra au Conseil de sécurité de l’agilité et de la flexibilité pour fonctionner virtuellement dans la “nouvelle normalité” d’un monde post-COVID19. Il nous semble utile que le Conseil partage avec l’ensemble des membres ses réflexions et son évaluation de la manière dont il s’est adapté aux méthodes de travail virtuelles. Une telle réflexion sur les pratiques employées pourrait fournir de précieux conseils pour les futurs scénarios dans lesquels les réunions physiques ne seraient pas envisageables. Celle-ci pourrait inclure non seulement les leçons liées à la conduite des réunions et à l’adoption des résolutions, mais aussi, plus généralement, la manière dont le Conseil a fonctionné pendant ces temps difficiles.
En ce qui concerne la question plus large des méthodes de travail au-delà de celles spécifiques à la COVID-19, je tiens à souligner que les négociations intergouvernementales sur la réforme du Conseil de sécurité ont examiné des propositions visant à améliorer les méthodes de travail du Conseil. J’ai eu l’honneur de superviser le processus en tant que coprésidente pour la troisième année consécutive, et il est encourageant de constater la convergence entre les travaux des négociations intergouvernementales et ceux du groupe de travail informel. Pour compléter ces travaux, je proposerais, dans le cadre de mes fonctions nationales, trois recommandations qui permettraient d’améliorer sensiblement l’efficacité et la transparence du Conseil de sécurité de manière plus générale.
Premièrement, une répartition plus équilibrée des tâches entre les différents rédacteurs n’est pas simplement une question d’inclusion, mais pourrait contribuer à rendre le Conseil plus efficace. En effet, nous constatons que des discussions sont en cours depuis quelques années sur la nécessité d’élargir le système de rédaction afin d’inclure davantage de membres élus. Nous reconnaissons que des progrès ont été réalisés, notamment l’inclusion de certains présidents de comités de sanctions en tant que co-rédacteurs. Toutefois, cette pratique est loin d’être systématique. Les présidents des comités de sanctions peuvent en fait apporter une valeur ajoutée considérable et une perspective importante dans l’élaboration des résultats du Conseil, et devraient donc être consultés, voire servir de co-rédacteurs.
Deuxièmement, améliorer l’interaction avec les pays contributeurs de contingents et d’effectifs de police n’est pas une demande nouvelle, et c’est un autre domaine dans lequel des progrès ont certainement été réalisés au fil des ans. L’une des huit notes de la présidence adoptées sous la présidence koweïtienne du groupe de travail informel comprenait une disposition permettant aux participants concernés aux réunions du Conseil, dont les pays contributeurs de contingents et d’effectifs de police, d’avoir accès aux rapports du Secrétaire général au moins quatre jours ouvrables avant qu’ils ne soient examinés au Conseil. Néanmoins, des améliorations sont encore possibles. Il est important de noter que le simple fait d’avoir plus de réunions avec les contingents et les effectifs de police ne renforce pas leurs relations avec le Conseil. Le Conseil devrait s’efforcer d’établir un dialogue triangulaire plus substantiel et interactif entre le Conseil, le Secrétariat et les pays fournisseurs desdits contingents et effectifs de police tout au long du cycle des mandats des missions afin de réfléchir à la planification, à la conception et à la mise en œuvre des mandats.
Enfin, les EAU ont souligné lors de précédents débats publics la nécessité de renforcer et de soutenir les capacités des États afin que ceux-ci puissent respecter leurs obligations juridiques découlant des résolutions du Conseil. Cela commence par l’adoption de résolutions plus courtes par le Conseil, formulées dans un langage plus clair qui prend en considération le large éventail de capacités des États à pouvoir les mettre en œuvre. Le Conseil devrait également veiller de façon plus systématique à ce que les nouvelles obligations juridiques soient expliquées à l’ensemble des membres, par exemple par le biais de réunions avec les différents présidents des comités de sanctions, ce qui permettrait aux membres de formuler des questions.
Le coronavirus a donné du fil à retordre au Conseil de sécurité. Les fondateurs de l’ONU étaient loin d’imaginer que le Conseil fonctionnerait virtuellement. Mais en fait, les aménagements apportés par le Conseil de sécurité aux nouvelles circonstances lui ont permis de remplir ses fonctions principales. Profitons de cette occasion pour démontrer au monde entier la capacité du Conseil de sécurité à faire preuve de souplesse et d’agilité pour remplir sa fonction première tout en adhérant aux principes d’efficacité, de performance et de transparence.